Entreprendre dans le digital #3: « S’associer à un développeur »
Publié le 14/06/2022
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Publié le 14/06/2022
Diplômé de NEOMA, Axel Guidicelli (PGE 17) associé à Lancelot Hardel lance en 2017 Ulysse, un site de vente de billets d’avion. Comprenant que l’expérience est souvent laborieuse pour les voyageurs, il simplifie le process. Depuis, son entreprise passée par l’incubateur de l’Ecole se fraie un chemin au milieu de ses concurrents. En septembre 2021, elle levait 4 millions d’euros. Leçon d’entrepreneuriat.
Ulysse, c’est une solution simple et fiable pour voyager en avion. C’est suite à un tour du monde, alors que vous étiez encore étudiant à NEOMA, que vous avez eu cette idée. Que s’est-il passé ?
Je devais réserver beaucoup de billets d’avion, et à chaque fois, je trouvais que l’expérience était très complexe. Les prix varient tout le temps, les options sont souvent inutiles, on se retrouve avec des assurances que l’on n’a pas demandées, les services clients sont peu réactifs, et quand on parvient à les joindre, ils règlent rarement le problème. Aujourd’hui Ulysse permet de trouver, de réserver, et de gérer son voyage sur une seule interface. Celle-ci est épurée, sans publicité. Vous pouvez y entrer toutes vos informations personnelles, votre profil et ceux avec qui vous avez l’habitude de voyager. L’expérience du voyageur est de haute qualité, quelle que soit la compagnie aérienne, et notre service clients est ultra réactif.
Le service client, ce n’est donc pas un chatbot qui répond aux clients …
Non. Ça nous tenait à cœur de ne pas supprimer la relation humaine. Quand vous contactez notre service client, c’est quelqu’un qui répond par mail. Les robots n’ont pas ce ton naturel. En revanche, pour que les problèmes soient réglés rapidement, on automatise le traitement des demandes. On passe la moitié de notre temps à créer des outils. C’est ce qui nous a permis de tenir pendant le Covid : le nombre de messages a été multiplié par 20. On a pu les traiter, et en plus avoir de nombreux avis positifs.
Si l’expérience pour les clients est simple, qu’est-ce que ça implique en termes d’organisation pour Ulysse ?
Nous sommes répartis en quatre équipes. Une équipe dédiée au service clients, qui répond et résout leurs problèmes. Une équipe « produit et tech », qui construit le site, et les outils du service clients pour régler les problèmes le plus rapidement possible. Une équipe « marketing » qui communique beaucoup sur l’actualité des pays, leur ouverture, leur fermeture. Une équipe dite « supply », qui gère la relation avec les compagnies aériennes. C’est important pour nous d’être en direct avec elles pour régler les questions rapidement, pour proposer des meilleurs tarifs, et surtout pour offrir des services que les autres n’ont pas. Comme la possibilité de choisir un menu dans l’avion, d’ajouter un bagage en plus, ou encore de modifier gratuitement un vol.
Le marché du voyage est très concurrentiel. Qui sont les grands acteurs ? Quelle est la place d’Ulysse ?
Il y a deux types d’acteurs -en plus des compagnies qui produisent les billets. D’un côté, les comparateurs de vols, type Kayak, Liligo, SkyScanner, et ils font du bon travail ; de l’autre les agences de voyage en ligne comme Opodo, Expedia, Go Voyage. Ces entreprises-là ont plus de 30 ans, l’expérience de réservation et d’achat n’a pas changé depuis le début d’Internet. Tous ces sites ont la même stratégie : proposer les meilleurs prix du marché. Ils investissent beaucoup sur le marketing, et peu sur la qualité du produit. Nous on a eu envie de créer une alternative, et d’investir sur le service pour que les gens viennent, et reviennent.
Concernant le transport aérien, les questions écologiques se posent. De quelle manière vous intégrez ces enjeux ?
En effet, nous sommes les premiers à dire que certains voyages en avion ne devraient plus exister. Ça me coûte parfois plus cher d’aller voir mes parents en région parisienne que de partir à Milan en avion. Aujourd’hui, la question : comment voyager mieux. Ça nous semble sensé de supprimer les avions quand il existe une alternative en train. Nous voulons par exemple créer un filtre qui permettrait de sélectionner les avions qui sont moins polluants, ou ceux qui empruntent des trajectoires plus courtes. Mais on ne pourra pas, seuls, avoir un impact sur la planète. La solution la plus pérenne viendra des constructeurs.
Mars 2020, les avions sont cloués au sol. Le Covid paralyse le transport aérien : que s’est-il passé chez Ulysse ?
En mars 2020, nous sommes passés de nos meilleurs mois de vente à zéro. Bien sûr, nous avons été submergés d’annulations. On a eu un taux de contacts proche des 100%, contre seulement 10% habituellement. Alors, nous avons essayé de faire preuve de résilience, et de montrer que dans un moment difficile, nous nous battons. Les outils sur lesquels nous avions mis tous nos efforts pour améliorer la productivité des équipes nous ont permis d’absorber la charge. Et on a remboursé tous nos clients. Mais on ne va pas se mentir : c’est une chance d’être petit. On traite 20 000 billets par an, ce n’est pas 200 000. On a pu se positionner comme un acteur fiable, on a gagné pas mal de clients. Si bien qu’en en 2020 on a un fait un meilleur chiffre qu’en 2019.
En septembre 2021, vous avez réussi une levée de fonds de 4 millions d’euros. Quels sont maintenant les projets de développement d’Ulysse ?
Comme nous avons beaucoup investi sur la partie recherche et réservation, maintenant nous travaillons sur la partie post-réservation. Sur la plupart des sites, on abandonne le client après l’achat du billet. Alors qu’il y a encore beaucoup de questions, la porte d’embarquement, les vaccins, les visas… On va donc développer une application.
Et ensuite, on va continuer à s’étendre, on teste d’autres marchés, américain, anglais et espagnol. Selon les résultats, on se focalisera sur l’un d’entre eux. Notre objectif en 2022 est de doubler ou tripler le volume de billets.
Vous êtes passé par l’incubateur de NEOMA. Qu’est-ce qu’il vous a apporté dans votre entreprise ?
L’incubateur m’a permis d’être bien s’entouré, de trouver des gens qui ont de l’expérience. Dès les premiers jours, on a eu des mentors, des advisors qui nous ont aidés. Quand ce n’est pas bien, eux le disent.
Erreur n°1/ M’associer à un ami – qui est toujours mon ami. Mais c’était quelqu’un qui avait un profil trop similaire au mien. A nous deux, on n’apportait pas de la valeur supplémentaire. Or, il faut des compétences de développeur, qui sont indispensables quand on se lance dans le digital. Le mieux, c’est d’avoir un associé qui maîtrise cette partie-là. Comme elle est stratégique, elle doit être dans l’entreprise. C’est dur de trouver quelqu’un.
Erreur n°2/ Prendre la première personne que je trouvais. Il faut un associé avec qui on a quand même des atomes assez crochus. Pour Ulysse, j’ai pris mon temps, et je ne me suis pas trompé.