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Le Monde de NEOMA

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La technologie basée sur l’intelligence artificielle nous rendra-t-elle idiot ? Ou au contraire peut-elle augmenter les capacités humaines ? Peut-elle aussi mieux préparer les étudiants à un monde du travail numérisé et changeant ? Le point de vue d’Alain Goudey, Directeur général adjoint du Numérique à NEOMA.

L’intégration de l’intelligence artificielle (IA) ou de l’intelligence artificielle générative (Gen AI) révolutionne nos méthodes d’enseignement, d’apprentissage voire de pensée. Non seulement, elle nous donne, à nous professeurs, la capacité de personnaliser l’éducation, d’enrichir et de diversifier l’approche pédagogique mais aussi de développer la diversité des capacités humaines. Elle nous permet de répondre de manière plus efficace aux besoins individuels des apprenants. 

Des contenus pédagogiques enrichis et personnalisés

Certains étudiants ont besoin de prendre du recul sur ce qu’ils apprennent, de connecter les idées entre elles. Ce sont des apprenants dits réflexifs. Pour ceux-là l’intelligence artificielle peut imaginer des systèmes de questions-réponses pour générer des idées (exemple : Quels pourraient être les conflits intéressants dans un roman de science-fiction ?); elle peut offrir des feedbacks détaillés sur une première ébauche ; ou encore fournir des explications approfondies sur des sujets. D’autres apprenants sont dits actifs, c’est-à-dire qu’ils apprennent mieux en faisant. L’IA invente pour eux des simulations et des jeux éducatifs. Cette expérience par la pratique dans un environnement virtuel renforce ainsi la compréhension et la mémorisation. Il y a ceux encore qui enregistrent mieux les informations par l’interaction sociale, ce sont les apprenants relationnels. Dans ce cas, l’IA peut faciliter la création de communautés d’apprentissage virtuelles avec un tuteur, elle peut proposer des activités de groupe, des discussions modérées, et des jeux de rôle. Les assistants vocaux et les applications d’apprentissage des langues en est l’exemple le plus populaire. Ils offrent une pratique linguistique interactive, avec des corrections et des suggestions en temps réel. Ces outils peuvent détecter des nuances dans la prononciation, la grammaire, et l’utilisation du vocabulaire, ils fournissent un retour personnalisé qui facilite un apprentissage linguistique plus profond et plus nuancé.

Création : l’IA permet de dépasser nos limites

L’intelligence créative peut elle aussi être stimulée par l’IA. Cet esprit qui aime penser de manière innovante, résoudre des problèmes de façon originale, et créer de nouvelles idées peut trouver une source d’inspiration dans ces outils. On pense notamment aux générateurs de texte (ChatGPT, Google Gemini, Claude 3, Mistral Large, etc.), aux éditeurs de photos (Midjourney, Stable Diffusion, etc.) et aux logiciels de composition musicale (Suno, Udio). Au lieu d’être une menace, ils peuvent aussi abolir le syndrome de la page blanche des auteurs, ou enrichir leur prose avec des suggestions de vocabulaire et de style. Dans le domaine du design, l’IA peut aider à concevoir des produits innovants, explorant une multitude de configurations, intégrant des critères, tels que la durabilité, l’esthétique, les contraintes techniques ou mécaniques, la fonctionnalité. L’an dernier, Toyota a commencé à la solliciter pour la conception de ses véhicules. Les ingénieurs ont pu dépasser les limites de l’imagination humaine et explorer des formes et des structures impensables encore il y a deux ans.

L’IA, le miroir de nos émotions ? 

Et quid de l’intelligence émotionnelle ? Elle aussi peut trouver dans l’IA un vrai stimulant. En effet, certains applications et plateformes éducatives sont capables d’analyser les expressions faciales ou le ton de la voix, et d’en déduire un état intérieur à l’instant T. Ce qui peut être très utile lors d’une préparation à la prise de parole en public. Les utilisateurs prennent conscience de leurs propres émotions et de celles des autres, ils sont alors en mesure de les comprendre et de les gérer. Mieux encore, on voit naître aujourd’hui des simulations basées sur l’IA et des jeux de rôle virtuels. Ceux-là offrent des environnements sécurisés où les apprenants peuvent expérimenter différentes situations sociales et émotionnelles. Ils apprennent à naviguer dans des interactions complexes et développent des compétences telles que l’empathie, la négociation, et la résolution de conflits. Une telle pratique serait difficilement réalisable dans un cadre de classe plus traditionnel.

L’IA exige un esprit critique

Mais attention à ne pas devenir trop accro à l’IA. Dans l’éducation, elle pourrait mener aussi à une diminution des compétences interpersonnelles, comme la communication et la collaboration, cruciales dans le monde professionnel. Poussé à l’extrême, cela pourrait conduire à une dépendance affective envers ces entités virtuelles… Le phénomène s’observe déjà en Chine. Les utilisateurs sollicitent les assistants IA pour obtenir réconfort et conseils, un soutien émotionnel disponible à toute heure. ’

L’intégration de l’IA dans le domaine de l’éducation pose bien sûr d’autres questions. D’abord, celle de de la gestion des données générées par les étudiants lors de l’utilisation des plateformes. Elles sont collectées, stockées, analysées. Ce sont des informations personnelles qui doivent être protégées par des protocoles stricts. Elles nécessitent le respect du RGPD et de l’AI Act à venir. Ensuite, elle pose la question des biais qu’elle reproduit et amplifie. Les algorithmes d’IA sont en effet conçus par des humains sur des données choisies. Le risque est la perte de regard critique et l’homogénéisation des visions du monde.

Il est donc indispensable que l’humain développe une nouvelle intelligence : la compréhension du fonctionnement de l’IA, et l’esprit critique sur cette technologie. Les réponses « moyennes » du robot ne peuvent pas être prises pour argent comptant, il faut les ciseler, les rendre meilleures. Toutes les études montrent que c’est l’alliance humain/IA qui est de loin la plus efficace.

Il existe enfin un risque d’inégalité dans l’accès à l’éducation améliorée par l’IA. Il ne faudrait pas que seuls les établissements dotés de ressources suffisantes offrent ces technologies avancées à leur communauté, creusant le fossé des différentes inégalités déjà existantes dans la société.

Cet article a été publié dans le NEOMAG de juin 2024 consacré aux intelligences multiples. Cliquez ici si vous souhaitez le découvrir dans son intégralité. 

 

A SAVOIR

IA : NEOMA met tout le monde à la page

En septembre 2023, NEOMA lançait le dispositif d’acculturation à l’Intelligence Artificielle Générative à 360°. Il se décline sous plusieurs formats adaptés aux différents publics : des cours pour tous les étudiants de l’Ecole, des sessions régulières de formation pour les professeurs, et des modules de formation dédiés aux collaborateurs.

« Avec ce dispositif transversal ambitieux, notre objectif est non seulement de permettre à l’ensemble de notre communauté de maîtriser le potentiel de l’Intelligence Artificielle Générative, mais également de diffuser son usage dans l’ensemble de nos activités », précise Delphine Manceau, la directrice générale de l’école. « Plus que jamais, nous voulons consolider notre statut d’école pionnière en matière d’innovation pédagogique et renforcer encore davantage la transformation digitale dans laquelle NEOMA est engagée ». L’AACSB a sélectionné ce dispositif comme l’une des 26 innovations majeures dans le monde de l’éducation et du management en 2024.

 

AACSB : Association to advance collegiate schools of business