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Le Monde de NEOMA

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Dans quelles mesures les PME adoptent-elles des pratiques en faveur de l’environnement ? Un article rédigé par une équipe de chercheurs, incluant Nathalie Spielmann de NEOMA, met en exergue l’orientation proactive des petites et moyennes entreprises, ainsi que le rôle des pressions réglementaires dans l’adoption de stratégies environnementales et leur succès à long terme.

Dans un monde en constante évolution, la durabilité et le respect de l’environnement occupent une place de plus en plus prépondérante. En ce sens, les petites et moyennes entreprises (PME) font face à une pression croissante de la part de la société et des régulateurs pour mettre en place des démarches environnementales. Les parties prenantes exigent par exemple que les PME rationalisent leur consommation en énergie, en eau et en matières premières, qu’elles améliorent la gestion de leurs déchets, développent des produits plus respectueux de l’environnement ou encore, qu’elles réduisent leurs émissions de CO2. En pratique, cela se traduit par la suppression d’emballages superflus dans le packaging alimentaire, mais aussi par l’optimisation des procédés de fabrication réduisant le nombre de pièces mises au rebut dans l’industrie mécanique.

Toutefois, la recherche a montré que les PME sont globalement en retard en termes de durabilité par rapport aux grandes entreprises. Lorsqu’une nouvelle réglementation émerge, elles ont même tendance à mettre en œuvre des actions minimales par manque de ressources ou d’intérêt. Il serait néanmoins erroné de généraliser ces observations. Car certaines PME particulièrement proactives perçoivent la durabilité comme une opportunité. Nathalie Spielmann et ses collaborateurs ont cherché à mieux comprendre pourquoi et dans quelles mesures les PME entreprenantes se lancent dans des approches raisonnées. Ils se sont aussi intéressés à l’influence du contexte réglementaire dans l’orientation de ces entreprises vers un chemin vertueux.

De la proactivité à la durabilité

Les chercheurs ont mené une enquête auprès de 286 petites et moyennes entreprises de l’industrie vitivinicole en Italie, en France, au Danemark et aux États-Unis. Le changement climatique et d’autres questions de durabilité sont au cœur des préoccupations de ces entreprises, compte tenu de leur impact substantiel et de leur dépendance à l’égard du milieu agricole. Par ailleurs, ce secteur est majoritairement composé de PME, ce qui en fait un bon terrain d’étude.

Premier constat : les PME les plus entreprenantes tendent à anticiper les exigences environnementales plutôt qu’à réagir aux changements réglementaires. Si certaines d’entre elles peuvent être motivées par les convictions personnelles de leurs dirigeants ou par simple esprit d’innovation, c’est bien leur proactivité générale qui joue un rôle déterminant dans l’adoption de pratiques durables.

Deuxième constat : les efforts de ces PME sont récompensés par une amélioration de leurs performances financières et de leur réputation à long terme. Ces entreprises ont donc tout simplement une avance concurrentielle sur celles qui n’ont pas de stratégie intégrant la durabilité. L’étude montre aussi que les clients et les fournisseurs sont moteurs dans l’initiation de démarches respectueuses de l’environnement. Les capacités des entreprises à prendre des risques ou à innover ne jouent pas, quant à elles, de rôle significatif.

Des pratiques renforcées par les réglementations

Au cours de la dernière décennie, la réglementation environnementale s’est renforcée dans de nombreuses industries à travers le monde. L’étude des chercheurs révèle que plus ces pressions sont fortes, plus elles renforcent l’adoption de pratiques écologiques dans les PME proactives. De fait, lorsque les réglementations sont peu contraignantes, ces entreprises ont tendance à se concentrer sur d’autres leviers d’action leur permettant de différencier leurs produits et de minimiser leurs coûts. Renforcer les contraintes environnementales les incite au contraire à se focaliser davantage sur des enjeux de durabilité. Par ailleurs, lorsque les PME entreprenantes s’attaquent aux défis environnementaux, elles vont souvent au-delà des exigences légales.

Les chercheurs notent cependant que ces pressions n’agissent pas de manière uniforme sur l’ensemble des sphères d’action des entreprises. Les règlementations semblent avoir un effet plus prononcé sur la gestion des opérations et celle des déchets dans les PME proactives. Pourquoi ? Parce qu’elles traitent d’aspects tangibles : elles sont liées à la chaîne d’approvisionnement, à l’énergie, à l’eau et aux matériaux, sur lesquels les effets positifs sont plus facilement mesurables et contrôlables.

Plus globalement, les enjeux en matière de pratiques environnementales pour les PME sont multiples. Au-delà des aspects réglementaires, ils portent sur des questions de coût, d’image de marque et de compétitivité. Finalement, les PME qui ont les yeux davantage tournés vers l’avenir et la société de demain contribuent entièrement aux objectifs de développement durable des Nations unies tout en s’assurant une longueur d’avance.

En savoir plus

Beverly B. Tyler, Brooke Lahneman, Daniele Cerrato, Allan Discua Cruz, Karin Beukel, Nathalie Spielmann & Marco Minciullo (2023) Environmental practice adoption in SMEs: The effects of firm proactive orientation and regulatory pressure, Journal of Small Business Management, https://doi.org/10.1080/00472778.2023.2218435