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Le Monde de NEOMA

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Amélie Kanagasabai, diplômée (PGE 18), figure parmi les 35 « leaders positifs de moins de 35 ans à suivre » du Palmarès les Echos START 2024. Depuis plus de 10 ans, elle s’engage en effet fortement pour l’égalité des chances et la justice sociale. Nous l’avions rencontrée en 2021 (Lire l’article) alors qu’elle suivait le Graduate Programme d’Orange, un parcours sélectif d’intégration et accélérateur de carrière pour les jeunes diplômés. Nous faisons le point aujourd’hui sur ses combats.

Vous travaillez chez Orange depuis cinq ans, vous occupez aujourd’hui le poste de chief of staff dans une entité BtoB, communication services. Qu’avez-vous fait de vos engagements pour l’égalité des chances ?  

En entrant chez Orange, je voulais poursuivre les engagements associatifs que j’avais initiés au sein de NEOMA et de l’association Article 1, qui m’avait mentorée depuis la prépa. Que ces engagements importants dans ma vie ne s’arrêtent pas parce que j’avais rejoint l’entreprise. Au contraire. En étant maintenant dans une situation plus privilégiée, j’avais envie que ma voix porte encore plus. Ce qui m’anime c’est l’égalité au sens large, la justice sociale, la lutte contre les discriminations, quelles qu’elles soient.

Chez Orange, j’ai eu la chance de pouvoir m’exprimer sur ces sujets. J’ai signé une tribune dans Les Echos (Lire ici), je suis intervenue lors de la Journée mondiale de l’égalité des chances. Au quotidien, il s’agit de ne rien laisser passer quand j’entends un propos de teneur raciste ou encore sexiste. Mais, malgré tout, ce n’est pas une posture facile à tenir.

Voilà quelques années que vous êtes engagée pour l’égalité des chances, comme vous dîtes au sens large, quels sont vos constats les plus tristes ?

Ça n’avance pas assez vite sur ces sujets ! On cristallise beaucoup sur les questions diversité/égalité de genres, qui sont très importantes, mais qui jettent le voile sur les autres inégalités, plus difficiles à aborder, comme les inégalités socio-économiques ou ethno-culturelles. Ça ne les fait pas avancer à la même vitesse.

On a aussi du mal à mesurer l’importance de ces sujets qui restent encore cantonnés à la sphère RSE. Ils sont peu liés à l’aspect business et économique de l’entreprise, et je vois à cela plusieurs problèmes : ceux qui défendent la diversité disent que ça va créer plus d’émulation et de valeur, avec des profils moins standardisés, mais aucune étude ne le prouve. Et si demain, dix études indiquent le contraire, est-ce que l’on va arrêter de développer des politiques inclusives dans l’entreprise ? Je pense qu’il faut que l’entreprise représente la société telle qu’elle est, dans sa pluralité.

Qu’est-ce qui, au contraire, vous rend optimiste ?

Il y a une vraie prise de conscience parmi les personnes de ma génération et celle qui suit. Même si ce n’est pas seulement générationnel, beaucoup de jeunes ont envie de s’engager sur ces sujets, et pour eux, les engagements et les valeurs de l’entreprise deviennent un critère de sélection. Ça donne bonne espoir.

De plus, quand je vois les autres lauréats du Top 35 des Echos, je me dis qu’il y a énormément d’initiatives prometteuses, qu’elles soient citoyennes, associatives, ou dans l’entreprise. C’est un changement systémique qui pourra vraiment inverser la tendance.

Pour faire bouger les lignes vous organisez les Assises de l’égalité des chances le 25 avril 2024 avec l’association Article 1. De quoi s’agit-il ?

Le sous-titre de cet événement, c’est « l’inégalité des chances décryptée par celles et ceux qui la vivent ». Il prend la forme de tables rondes, le matin par exemple, nous aborderons la thématique du « mythe de la méritocratie et de l’universalisme ». L’après-midi se concentrera sur l’importance d’une culture inclusive dans l’entreprise, au-delà du recrutement Comment créer un espace où toutes les personnes se sentent suffisamment bien pour travailler et s’épanouir ? Nous organisons également des ateliers expérientiels, comme la marche de l’égalité. On attend 150 personnes et vous encourage à venir nombreux.

Lors de votre parcours, vous avez rencontré Fabienne, une diplômée de NEOMA. Elle a été votre mentor, vous dîtes qu’elle vous a donné confiance en vous. Est-ce indispensable pour réussir professionnellement ?

Dans aucun cas, on ne peut y arriver tout seul, encore moins quand on n’a pas les codes, quand on n’est pas issu d’une famille et d’une classe sociale privilégiée, Ce qui fait la différence, ce sont les rencontres qui se provoquent grâce à des dispositifs d’égalité des chances comme l’association Article 1. Oui le mentorat sert à quelque chose, je ne dirai jamais le contraire, mais ça ne peut être qu’un palliatif dans un système où les dés sont déjà pipés, où certains ont plus de chances d’y arriver. Et à la terminologie « ascension sociale », je préfère la notion sociologique « d’émancipation sociale ». En effet, ce n’est pas réussir que d’être cadre dans une entreprise, réussir c’est avoir les moyens de se poser des questions, et de ne pas se préoccuper des fins de mois.